Tunisie : Etat tunisien contre Ben Ali - Un procès TGV 21.06.11

Publié le par printempsdespeuples44

 

Plusieurs centaines de manifestants, dont certains réclamaient la peine de mort, se sont rassemblés devant le palais de justice pour demander que l'ancien président soit ramené dans son pays. Les autorités saoudiennes n'ont pas donné suite à la demande d'extradition de Tunis.

 

Le procès que l'on annonçait depuis plus d'une semaine a finalement eu lieu. Après deux décennies de règne sans partage, le couple Ben Ali/Trabelsi, réfugié en Arabie saoudite depuis le 14 janvier dernier, date de leur fuite, a été jugé. Pas moins de 93 chefs d'inculpation étaient retenus contre l'ancien couple présidentiel et quelques grandes figures du clan des potentats déchus, tous, sauf exceptions, à l'abri à l'étranger. Un handicap majeur qui n'a pas empêché la tenue du procès. Et vous parlez d'un procès !

Poursuivis pour «détention d'armes et de stupéfiants, pour accaparement de fonds et vols de biens», les anciens locataires du palais de Carthage, après les ors de la république et l'ivresse du pouvoir, se sont vus relégués au rang de malfrats, de bandits de grand chemin.

On s'attendait donc, au vu des charges pesant contre eux, à voir les débats s'étendre sur quelques jours. Mais les amateurs de feuilletons judiciaires sont restés sur leur faim. Le procès du siècle est à des années lumière de ses promesses. En moins d'une journée, la messe était dite.

Et c'est devant une poignée de journalistes que le couperet, si tant est qu'il y en ait un, est tombé : ainsi, «le tribunal de première instance a jugé avérés les faits reprochés à Zine El Abidine Ben Ali et Leïla Trabelsi». Un verdict aussi laconique que le procès qu'il est censé conclure.

Expédié en seulement quelques heures, ce procès du siècle a rendu son verdict, condamnant par contumace l'ex-dictateur et son épouse à une peine de 35 ans de réclusion et à des amendes cumulées de plus de 45 millions d'euros.

35 ans par contumace, la belle affaire ! Quand on sait que l'Arabie Saoudite, où ils sont réfugiés depuis leur renversement, a jusque là fait la sourde oreille aux demandes d'extradition des nouvelles autorités tunisiennes. Et pire, qu'est-ce que 45 millions d'euros alors qu'on estime la fortune des Ben Ali et de leur entourage à plusieurs milliards de dollars.

Mais il faut dire à sa décharge, que ce procès sans accusé ni débat, aura au moins tenu une de ses promesses, celle d'avoir été un coup de com. politique. Un ersatz de jugement venu à point nommé pour permettre aux nouveaux dirigeants issus de l'ancienne nomenklatura de tourner la page sombre des années Ben Ali tout en gardant bonne conscience.

 

Outre le procès en cours, Ben Ali doit être jugé par un tribunal militaire pour atteinte à la sûreté de l'Etat et homicides volontaires. Plusieurs centaines de manifestants ont été tués par les forces de l'ordre durant les trois semaines de contestation.

Dans un communiqué publié lundi, ses avocats contestent la responsabilité de Ben Ali dans ces événements.

"Il n'a pas donné l'ordre de tirer sur les manifestants et cela peut être prouvé par les contacts entre la présidence, le ministère de l'Intérieur et les différents ministères, qui sont enregistrés", écrivent-ils.

Ben Ali affirme par ailleurs par la voix de ses conseils que les armes sont des cadeaux de chefs d'Etat et que les bijoux ont été offerts à sa femme par des dirigeants étrangers.

Quant à l'argent et aux drogues, ils ont été cachés dans sa maison et le palais présidentiel après son départ du pouvoir dans le cadre d'une machination, ajoute-t-il.

PROJET D'ASSASSINAT ?

Ses avocats expliquent par ailleurs qu'il a accepté, le 14 janvier, d'emmener sa famille en Arabie saoudite pour la protéger mais assurent qu'il avait l'intention de revenir immédiatement.

Ce jour-là, comme les précédents, des milliers de manifestants s'étaient rassemblés à Tunis pour réclamer sa démission après 23 ans d'un règne autoritaire.

Le responsable de la sécurité présidentielle est venu le voir, racontent les avocats de l'ancien président, pour l'informer d'un projet d'assassinat que lui avait confié une source au sein des services de renseignement.

Il a été convaincu d'embarquer pour Djeddah, en Arabie saoudite, avec sa femme et ses enfants.

"Il a pris place à bord de l'avion avec sa famille après avoir donné ordre à l'équipage de l'attendre à Djeddah. Mais après son arrivée à Djeddah, l'avion est rentré à Tunis sans l'attendre, contrairement à ses instructions", peut-on lire dans le communiqué.

"Il n'a pas abandonné son poste de président de la République et n'a pas fui la Tunisie, comme il en a été accusé à tort."

Ben Ali a estimé que son procès constituait une tentative de la part des nouveaux dirigeants de détourner l'attention et de masquer leur incapacité à rétablir la stabilité en Tunisie.

Depuis sa chute, grèves et émeutes se produisent régulièrement malgré les efforts déployés par le gouvernement de transition pour rétablir l'ordre.

La révolution tunisienne a été le déclencheur du "printemps arabe". Le président égyptien Hosni Moubarak, renversé le 11 février, doit être jugé le 3 août.

Publié dans Tunisie

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article